Le commerce des armes en 2025

Hausse du danger pour la Paix mondiale

« L’augmentation des exportations d’armes à partir des pays de l’OTAN et l’augmentation des importations vers l’Europe et la zone Asie-Pacifique montrent clairement d’où viennent les dangers pour la Paix : les armes sont toutes destinées à être utilisées. L’industrie militaire contribue à l’appauvrissement de l’économie nationale. »

Le SIPRI, Institut International de Recherche sur la Paix de Stockholm, est la source incontournable des données sur le commerce des armes et les politiques d’armement. Comme chaque année en mars, il publie les chiffres sur le commerce des armes. Pour les budgets des armées, il faudra attendre fin avril.
Les données sur les exportations et importations sont présentées par périodes de cinq ans compte tenu surtout des délais entre prévision d’achat, passation de commande, fabrication et livraison. Et il est fréquent que les commandes initiales soient modifiées et la corruption très présente sur ces marchés.
Le SIPRI estime que, dans cette analyse, les évolutions sont plus parlantes que les chiffres bruts.

Des évolutions contrastées

À l’échelle mondiale, en 2024, le volume global des transferts d’armes reste à peu près au même niveau, déjà très élevé, qu’en 2015-19 et 2010-2014 mais les équilibres ne sont pas les mêmes. L’Europe et les Amériques augmentent quand les autres régions, Asie-Océanie et Afrique diminuent. Les premiers exportateurs restent les USA avec 43% du total mondial (plus 21% par rapport à 2015-2019), loin devant la France, 9,6%. La Russie avec 7,8 % est en troisième position avec une baisse de 64% due principalement à ses besoins de guerre. La Chine est cinquième avec 5,9 % et l’Italie sixième avec 4,8 %.

L’Asie-Océanie reste la principale région importatrice d’armes malgré une baisse sensible de la Chine qui développe de plus en plus ses propres armes. Le Japon est le seul pays de la région à augmenter ses importations, + 93%, un quasi doublement.

La France livre des armes à 65 États, ses livraisons vers des pays européens ont presque triplé depuis 2015. L’Inde reste son principal client, juste avant le Qatar. Les importations d’armes des États européens membres de l’OTAN ont augmenté de 105% entre 2015-19 et 2020-24. Elles viennent des USA pour 64% (52% en 20l5-19), puis de la France et de la Corée du Sud 6,4%, de l’Allemagne 4,7% et d’Israël 3,9%. Certains grands importateurs comme l’Inde, la Chine, l’Arabie Saoudite ont enregistré une forte baisse de leurs importations.

Pour l’Ukraine, le montant des importations a été multiplié par cent depuis 2015-2019. 35 pays lui ont vendu des armes, les USA pour 45%, l’Allemagne pour 12%, la Pologne pour 11%. Précisons aussi que les « dons » d’armement étant comptabilisés sur le pays d’origine, les chiffres pour Kiev devraient être majorés. Quant à leurs « compensations », cela dépasse notre propos actuel !

Les importations d’Israël sont stables. Sont en baisse celles de l’Algérie, -73% et du Maroc, -26%. Avec un volume relativement faible, celles vers l’Afrique de l’ouest, avec en tête le Nigéria, sont en forte hausse, un quasi doublement, depuis 15 ans. Les importations du Brési1 ont augmenté de 77% entre les deux périodes.

Vers une économie de guerre ?

Un des enseignements de ces analyses est qu’il est illusoire de pouvoir doubler en 2 ou 3 ans le budget militaire français, avec les soldes des soldats, même en achetant massivement à l’étranger : un minimum de 10 ou 15 ans serait plus réaliste, sauf urgence réelle, cf. les problèmes actuels de l’Allemagne sur ce
point. L’affirmation que les Russes pourraient envahir toute l’Europe est aussi une grave contrevérité de propagande de guerre : les spécialistes militaires sérieux, y compris ceux qui sont plutôt favorables à l’augmentation de l’effort militaire, affirment que ce n’est pas possible et que leurs ambitions ne peuvent aller guère au-delà de la partie Est de l’Ukraine où ils sont déjà : ils ne sont même pas arrivés durablement jusqu’au Dniepr à Kiev !

L’affirmation de devoir passer en économie de guerre est aussi un mensonge de propagande destiné sans doute à nous « habituer » à cette idée et à nous inciter à y contribuer, par notre épargne notamment, pour le plus grand profit des marchands d’armes. Nous en sommes loin, heureusement, mais nous devons être très attentifs à dénoncer l’augmentation progressive, année après année, des budgets militaires et à exiger leur diminution, rapide, au profit des budgets sociaux.

Les industries militaires sont l’objet de spéculations financières considérables, elles affaiblissent l’équilibre général industriel au lieu de le stimuler (cf. l’article de Claude Serfati dans PP n° 676 de novembre 2022). Nous devons demander la nationalisation des industries militaires et que leurs fabrications soient calées en fonction de nos stricts besoins nationaux, éventuellement européens.

En savoir plus : Site internet du SIPRI Arms Transfers Database

N° 7oo – Avril 2025 – Planète Paix
Yves-Jean Gallas