Militarisation de la jeunesse
Un pas en arrière, deux pas en avant
Le 13 juillet, E. Macron a déclaré, devant l’hôtel de Brienne, « faire de la Défense une priorité » face à l’aggravation des menaces, d’où l’annonce d’une réforme organisationnelle d’ampleur des Armées avec le renforcement du pilier européen de l’OTAN. ll a aussi promis aux jeunes la possibilité de s’engager selon de nouvelles modalités au sein des armées.

Le Service National Universel (S.N.U.), lancé en 2019, visait à être généralisé à une classe d’âge dès la rentrée 2026; soumis à de nombreuses critiques liées à son coût, au manque d’organisation logistique et au faible nombre de volontaires dans une classe d’âge, la loi de finances pour 2025 a enterré sa généralisation. Néanmoins, dans l’esprit militariste des élites, hors de question de repenser les relations avec la jeunesse sur une base coopérative et sociale de nature à stimuler l’entraide, Emmanuel Macron a opéré des annonces en la matière, autour du 14 juillet 2025, confirmées et détaillés par le ministère des Armées.
Journée de Citoyenneté « renforcée » dès septembre
Ainsi, il est prévu à la rentrée 2025,la mise en place d’une Journée de Citoyenneté « renforcée », obligatoire pour tous les jeunes Français de 16 à 25 ans ; le nouveau format inclut les éléments suivants, sur une journée d’environ 7 heures (généralement de 8h30 à 15h:30 selon le schéma officiel) : cérémonie des couleurs (lever de drapeau) et chant de la Marseillaise, lecture de la Charte des droits et devoirs du citoyen français ; ateliers ludiques / immersifs : tir sportif laser, jeux de stratégie et tests d’aptitudes ; repas sous forme de ration militaire ; forum des métiers de la Défense (et Gendarmerie), incluant réalité virtuelle ; « Au revoir républicain » avec remise du bleuet de France, symbole mémoriel.
L’objectif est de resserrer le lien entre armée et nation, mieux faire connaître la défense, et détecter d’éventuels volontaires pour les réservoirs militaires, notamment la réserve opérationnelle (le nombre de 80 000 réservistes d’ici 2030 – et 105 000 en 2035 – est annoncé conformément aux plans de réarmement présentés dans la loi de Programmation Militaire 2024 – 2o3o).
Le dispositif sera déployé en métropole dès septembre 2025 et dans les territoires ultramarins à partir de début 2026.
S’appuyer sur le Collectif national contre la militarisation de la jeunesse et de l’école
Le collectif contre le SNU, devenu Collectif contre la militarisation de la jeunesse et de l’école a vigoureusement réagi à cette annonce de Journée de la Défense de la Citoyenneté militarisée et a produit un communiqué le 30 juillet : « Avec cette « Journée Défense et Citoyenneté » de plus en plus militarisée, l’État prévoit de créer une passerelle directe vers l’enrôlement dans l’armée, dans un contexte international qui voit se développer les conflits et leurs lots de victimes civiles. Comme pour le SNU, la propagande banalise le rôle de l’armée. Sans surprise, il n’est nullement question dans le programme de pacifisme, de non-violence, pas plus que de lutte contre tous les impérialismes ni de remise en cause du rôle de l’armée. »
L’évolution du collectif est consubstantielle du poids grandissant de l’armée auprès de la jeunesse dans une ambiance débridée de rupture des digues protégeant précédemment l’enseignement.
Ainsi, la loi de programmation militaire (2024-2030) prévoit d’élargir des initiatives comme « les classes de défense », destinées aux collégiens (souvent en 3e), ainsi que la sensibilisation en milieu scolaire à la défense, etc.
En mai 2025, on compte environ 1 100 classes de défense et de sécurité globale, impliquant près de 30 000 élèves, souvent en partenariat avec une unité militaire marraine.
Comme le relève en mars 2025 le plan « Ambition Armée-Jeunesse », chaque année, près d’un million de jeunes entre 13 et 25 ans bénéficient des offres proposées par l’armée dont 800 000 participants à la Journée Défense et Citoyenneté (JDC).
Face à cette montée en puissance de l’Armée dans la jeunesse, il est possible de s’appuyer sur le collectif national contre la militarisation de la jeunesse et de l’école, mais également sur ses comités locaux; pour contrer la vague bleue, la convergence associations – syndicats – organisations lycéennes et étudiantes doit être à la manœuvre autant que faire se peut. Il est encore temps de faire reculer les militaires hors de la jeunesse et des établissements scolaires.
N° 703 – septembre 2025 – Planète paix
Henri Vacher